Face à la loi El Khomri, la possibilité d’un mouvement de masse

Le projet de loi « travail » a suscité, dans les jours qui ont suivi sa publication, une levée en masse sur les réseaux sociaux, puis un premier appel à mobilisation pour le 9 mars. Partout, des initiatives s’organisent, des dizaines et des centaines de milliers de jeunes et salarié-e-s discutent, s’apprêtent à sortir dans la rue. La réaction est à la hauteur de l’attaque. Elle ouvre, surtout, pour la première fois depuis 2010, une possibilité : celle de voir émerger un mouvement de masse, qui soit à même de faire retirer ce projet de loi, et permette à tous les petits, les salarié-e-s, les chômeur-se-s, les étudiant-e-s, lycéen-ne-s, de reprendre l’initiative. C’est ce à quoi la jeunesse du NPA veut travailler dès maintenant.

Une attaque historique…qui découle de la guerre sociale menée par les capitalistes

Dans le dossier que nous consacrons à la loi « travail » et à la mobilisation à construire dans ce numéro, nous revenons en détail sur son contenu, et le programme de défense des intérêts des jeunes et du monde du travail que nous comptons lui opposer. Mais pour bien comprendre d’où vient une telle attaque, il faut la resituer dans son contexte. La crise systémique qui s’est ouverte en 2007 est venu percuter un capitalisme français qui se situait déjà sur une trajectoire déclinante, vis à vis des autres impérialismes, comme l’Allemagne à l’échelle du continent européen. C’est pour faire face à ces difficultés que les classes dominantes ont développé une politique extérieure toujours plus agressive, avec une guerre par an sous Hollande, pour s’ouvrir des marchés les armes à la main – ou parfois à coup de pression diplomatique, comme en Grèce avec le prétexte de la dette. C’est avec le même objectif qu’elles développent la guerre sociale ici, pour augmenter les profits en augmentant les horaires de travail, en faisant baisser les salaires réels, en supprimant toute protection contre les licenciements.

Des lois comme celle présentée par El Khomri sont passées dans les pays voisins dans les dernières années : Hartz 4 en Allemagne, réforme de l’article 18 en Italie, « tickets verts » au Portugal, flexibilisation contre remise de dette dans l’Etat espagnol…avec chaque fois pour conséquence une paupérisation massive, en plus de la généralisation de la précarité. La spécificité de la France, du point de vue capitaliste, est d’être en « retard » vis à vis de cette regression sociale. Pourquoi ? Parce qu’à plusieurs reprises la rue a dit non et a fait reculer les gouvernements. Ce fut le cas en 1995 contre le plan Juppé, en 2006 contre le CPE.

Il est désormais possible de faire reculer ce gouvernement

2010 : huit millions de personnes dans la rue, les raffineries bloquées, deux mois et demi de mouvement. Mais la réforme des retraites est passée, et c’est vers 2012 que les regards se sont tournés. Hollande en a profité pour faire le plein de voix. Quatre ans plus tard, des millions de personnes ont fait l’expérience de la perversité particulière du gouvernement socialiste, qui non seulement a poursuivi l’oeuvre pro-patronale, mais a pu le faire, « gauche » oblige, avec l’assentiment des grandes directions syndicales. La réaction massive qu’a provoqué la loi El Khomri est en ce sens une première ! C’est par en bas, du monde réel des ateliers, des bureaux, des salles de cours, qu’est montée la colère et que s’est imposée la perspective du 9 mars, après une pétition qui pourrait atteindre le million de signatures. Le torrent est puissant, si fort que même les grands médias sont obligés de le reconnaître. D’ailleurs, ils ont rapidement identifié dans la jeunesse le principal péril pour le gouvernement. Notre conviction est qu’ils ont bien raison !

Contre toute canalisation institutionnelle de notre colère : militer avec les jeunes du NPA, c’est élaborer et défendre une politique pour gagner

Avant même que ne s’ouvre cette nouvelle séquence, les politicien-ne-s étaient agités par l’échéance de 2017. A gauche de Hollande et Valls, la guerre fait rage sur les contours d’une primaire. Dans ce contexte, la manœuvre est classique qui consiste, pour ces professionnel-le-s de l’élection et des institutions, à se présenter comme les soutiens d’un éventuel mouvement, et les guide d’une renégociation de la loi qui la rendrait soit disant plus acceptable. En tant que jeunes révolutionnaires, nous lutterons contre toutes ces tentatives de récupération, et pour construire une mobilisation qui soit la plus massive possible, mais aussi la plus radicale. Nous défendrons pour cela le droit pour le mouvement de s’auto-organiser, à partir des lieux d’étude et de travail, et la perspective d’une convergence entre tous les secteurs en lutte, dans un combat commun pour le retrait intégral de la loi et contre ce gouvernement.