Brésil : un soulagement en demi-teinte ?
C’est finalement Lula qui a remporté l’élection présidentielle brésilienne, à 50,9 % des suffrages exprimés. Mais si 2 millions de votants de plus se sont tournés vers lui entre les deux tours, Bolsonaro, lui, a gagné trois fois plus de voix. Difficile de parler d’une « défaite », d’autant que droite et extrême-droite restent majoritaires au Parlement. Et quand le nouveau président de gauche fera passer des mesures contre la classe ouvrière, comme il l’avait déjà fait de 2003 à 2011, il pourra prétexter n’être que l’otage des réactionnaires.
Auréolé de son passé de syndicaliste et de mesures prises en faveur des plus pauvres lors de son mandat, Lula veille aujourd’hui à maintenir ses distances avec les scandales de corruption du PT qu’il a pourtant fondé. Mais il sait chercher d’autres alliances : avec les milieux d’affaires en prenant un vice-président de droite, avec les milieux religieux en clamant son opposition à l’avortement… Rien dans son programme, à l’inverse, pour les salaires ou les peuples autochtones.
Pendant ce temps l’extrême-droite reste active sur le terrain, comme en témoignent les rassemblements réclamant une intervention de l’armée à la suite des résultats. La gauche laisse ainsi face à eux les travailleurs désarmés, désorganisés, sans perspective propre. Elle abandonne leur sort aux mains des institutions et des puissances impérialistes, dont les multinationales importatrices sont responsables de la ruine des paysans pauvres du pays et du pillage de l’Amazonie, dont on respire l’oxygène jusqu’ici…
Le soulagement d’avoir dégagé Bolsonaro est compréhensible, mais il ne peut être que de courte durée. Le Brésil a heureusement une forte tradition de luttes ouvrières et paysannes. Pour les milliers de militants dont il dispose, c’est ce terrain qu’il faut reprendre. Là-bas comme ailleurs, leur regroupement autour des idées révolutionnaires se fait chaque jour plus urgent.